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Philosopher en Terminale ou en classes préparatoires
Philosopher en Terminale ou en classes préparatoires
  • Cours et plans de cours de Jean-Jacques Sarfati, professeur de philosophie. Lycée Marie Curie Versailles. « D’une manière générale ce qui prouve qu’on sait une chose c’est lorsque l’on est capable de l’enseigner ». Aristote Métaphysique. A 1
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10 octobre 2007

Y a t il un bon usage du droit de propriété ?

Y a t il un bon usage du droit de propriété ?

1) La remise en cause de la propriété en elle-même

a) Communisme de Platon (la République)
L'une des premières descriptions de communisme se trouve dans le dialogue La République de Platon.
Ce que l'on a appelé le "communisme platonicien" suppose sinon la suppression du moins la limitation drastique de la famille avec l’éducation collective des enfants ainsi que la soumission de toute propriété privée à la propriété de la Cité. L’erreur de Platon, d’après Aristote, est de vouloir unifier à l’excès la cité en supprimant tout ce qui sépare les individus pour aboutir à une union de fusion, comme celle que souhaitent les amants dans le discours d’Aristophane. (1262 b) C’est méconnaître que l’amitié se fonde sur une irréductible altérité. Platon pose en théorie le communisme essentiellement pour la classe dirigeante, ceci afin de faire cesser la corruption qui était habituelle dans tout gouvernement ; les deux autres classes étant les travailleurs et les gardiens de l'ordre.
b) Marx(Manuscrits de 1844)
"Nous avons donc maintenant à comprendre l'enchaînement essentiel qui lie la propriété pri­vée, la soif de richesses, la séparation du travail, du capital et de la propriété, celle de l'échan­­ge et de la concurrence, de la valeur et de la dépréciation de l'homme, du monopole et de la concurrence, etc., bref le lien de toute cette aliénation    [108] avec le système de l'argent. Ne faisons pas comme l'économiste qui, lorsqu'il veut expliquer quelque chose, se place dans un état originel fabriqué de toutes pièces. Ce genre d'état originel n'explique rien. Il ne fait que repousser la question dans une grisaille lointaine et nébuleuse. Il suppose donné dans la forme du fait, de l'événement, ce qu'il veut en déduire, c'est-à-dire le rapport ”nécessaire entre deux choses, par exemple entre la division du travail et l'échange. Ainsi le théologien explique l'origine du mal par le péché originel, c'est-à-dire suppose comme un fait, sous la forme historique, ce qu'il doit lui-même expliquer. Nous partons d'un fait économique actuel. L'ouvrier devient d'autant plus pauvre qu'il produit plus de richesse, que sa production croît en puissance et en volume. L'ouvrier devient une marchandise d'autant plus vile qu'il crée plus de marchandises. La dépréciation du monde des hommes augmente en raison directe de la mise en valeur du monde des choses. Le travail ne produit pas que des marchan­dises; il se produit lui-même et produit l'ouvrier en tant que marchandise, et cela dans la mesure où il produit des marchandises en général.
Ce fait n'exprime rien d'autre que ceci : l'objet que le travail produit, son produit, l'affron­te comme un être étranger, comme une puissance indépendante du producteur. Le produit du travail est le travail qui s'est fixé, concrétisé dans un objet, il est l'objectivation du travail. L'actualisation du travail est son objectivation. Au stade de l'économie, cette actualisation du travail apparaît comme la perte pour l'ouvrier de sa réalité, l'objectivation comme la perte de l'objet ou l'asservissement à celui-ci, l'appropriation comme l'aliénation, le dessaisissement. La réalisation du travail se révèle être à tel point une perte de réalité que l'ouvrier perd sa réalité jusqu'à en mourir de faim. L'objectivation se révèle à tel point être la perte de l'objet, que l'ouvrier est spolié non seulement des objets les plus nécessaires à la vie, mais encore des objets du travail. Oui, le travail lui-même devient un objet dont il ne peut s'emparer qu'en faisant le plus grand effort et avec les interruptions les plus irrégulières. L'appropriation de l'objet se révèle à tel point être une aliénation que plus l'ouvrier produit d'objets, moins il peut posséder et plus il tombe sous la domination de son produit, le capital.
Toutes ces conséquences se trouvent dans cette détermination l'ouvrier est à l'égard du produit de son travail dans le même rapport qu'à l'égard d'un objet étranger. Car ceci est évi­dent par hypothèse : plus l'ouvrier s'extériorise dans son travail, plus le monde étranger, ob­jec­tif, qu'il crée en face de lui, devient puissant, plus il s'appauvrit lui-même et plus son mon­de intérieur devient pauvre, moins il possède en propre. Il en va de même dans la religion. Plus l'homme met de choses en Dieu, moins il en garde en lui-même. L'ouvrier met sa vie dans l'objet. Mais alors celle-ci ne lui appartient plus, elle appartient à l'objet. Donc plus cette activité est grande, plus l'ouvrier est sans objet  [109] . Il n'est pas ce qu'est le produit de son travail. Donc plus ce produit est grand, moins il est lui-même. L'aliénation de l'ouvrier dans son produit signifie non seulement que son travail devient un objet, une existence extérieure, mais que son travail existe en dehors de lui, indépendamment de lui, étranger à lui, et devient une puissance autonome vis-à-vis de lui, que la vie qu'il a prêtée à l'objet s'oppose à lui, hostile et étrangère. [XXIII] Examinons maintenant de plus près l'objectivation, la production de l'ouvrier et, en elle, l'aliénation, la perte de l'objet, de son produit. L'ouvrier ne peut rien créer sans la nature, sans le monde exté rieur sensible. Elle est la matière dans laquelle son travail se réalise, au sein de laquelle il s'exerce, à partir de laquelle et au moyen de laquelle il produit. Mais, de même que la nature offre au travail les moyens de sub sistance, dans ce sens que le travail ne peut pas vivre sans objets sur lesquels il s'exerce, de même elle fournit aussi d'autre part les moyens de subsistance au sens restreint, c'est-à-dire les moyens de subsis­tance physique de l'ouvrier lui-même. Donc, plus l'ouvrier s'approprie par son travail le monde extérieur, la nature sensible, plus il se soustrait de moyens de subsis tance sous ce double point de vue : que, premièrement, le monde extérieur sensible cesse de plus en plus d'être un objet appartenant à son travail, un moyen de subsistance de son travail; et que, deuxièmement, il cesse de plus en plus d'être un moyen de subsistance au sens immédiat, un moyen pour la subsistance physique de l'ouvrier.
De ce double point de vue, l'ouvrier devient donc un esclave de son objet : premièrement, il reçoit un objet de travail, c'est-à-dire du travail, et, deuxièmement, il reçoit des moyens de subsistance. Donc, dans le sens qu'il lui doit la possibilité d'exister premièrement en tant qu'ouvrier et deuxièmement en tant que sujet physique. Le comble de cette servitude est que seule sa qualité d'ouvrier lui permet de se conserver encore en tant que sujet physique, et que ce n'est plus qu'en tant que sujet physique   [110] qu'il est ouvrier. (L'aliénation de l'ouvrier dans son objet s'exprime selon les lois de l'économie de la façon suivante : plus l'ouvrier produit, moins il a à consommer; plus il crée de valeurs, plus il se déprécie et voit diminuer sa dignité; plus son produit a de forme, plus l'ouvrier est difforme; plus son objet est civilisé, plus l'ouvrier est barbare; plus le travail est puissant, plus l'ouvrier est impuissant; plus le travail s'est rempli d'esprit, plus l'ouvrier a été privé d'esprit et est devenu esclave de la nature.) L'économie politique cache l'aliénation dans l'essence du travail  [111] par le fait qu'elle ne considère pas le rapport direct entre l'ouvrier (le travail) et la production. Certes, le travail produit des merveilles pour les riches, mais il produit le dénuement pour l'ouvrier. Il produit des palais, mais des tanières pour l'ouvrier. Il produit la beauté, mais l'étiolement pour l'ouvrier. Il remplace le travail par des machines, mais il rejette une partie des ouvriers dans un travail barbare et fait de l'autre partie des machines. Il produit l'esprit, mais il produit l'imbécillité, le crétinisme pour l'ouvrier. Le rapport immédiat du travail à ses produits est le rapport de l'ouvrier aux objets de sa production. Le rapport de l'homme qui a de la fortune aux objets de la production et à la pro­duc­tion elle-même n'est qu'une conséquence de ce premier rapport. Et il le confirme."

2) La question du "bon usage" proprement dit

a) Epicure Lettre à Ménécée
"Il est également à considérer que certains d’entre les désirs sont naturels, d’autres vains, et que si certains des désirs naturels sont nécessaires, d’autres ne sont seulement que naturels. Parmi les désirs nécessaires, certains sont nécessaires au bonheur, d’autres à la tranquillité durable du corps, d’autres à la vie même. Or, une réflexion irréprochable à ce propos sait rapporter tout choix et tout rejet à la santé du corps et à la sérénité de l’âme, puisque tel est le but de la vie bienheureuse. C’est sous son influence que nous faisons toute chose, dans la perspective d’éviter la souffrance et l’angoisse. Quand une bonne fois cette influence a établi sur nous son empire, toute tempête de l’âme se dissipe, le vivant n’ayant plus à courir comme après l’objet d’un manque, ni à rechercher cet autre par quoi le bien, de l’âme et du corps serait comblé. C’est alors que nous avons besoin de plaisir : quand le plaisir nous torture par sa non-présence. Autrement, nous ne sommes plus sous la dépendance du plaisir. Voilà pourquoi nous disons que le plaisir est le principe et le but de la vie bienheureuse. C’est lui que nous avons reconnu comme bien premier et congénital. C’est de lui que nous recevons le signal de tout choix et rejet. C’est à lui que nous aboutissons comme règle, en jugeant tout bien d’après son impact sur notre sensibilité.Justement parce qu’il est le bien premier et né avec notre nature, nous ne bondissons pas sur n’importe quel plaisir : il existe beaucoup de plaisirs auxquels nous ne nous arrêtons pas, lorsqu’ils impliquent pour nous une avalanche de difficultés. Nous considérons bien des douleurs comme préférables à des plaisirs, dès lors qu’un plaisir pour nous plus grand doit suivre des souffrances longtemps endurées. Ainsi tout plaisir, par nature, a le bien pour intime parent, sans pour autant devoir être cueilli. Symétriquement, toute espèce de douleur est un mal, sans que toutes les douleurs soient à fuir obligatoirement. C’est à travers la confrontation et l’analyse des avantages et désavantages qu’il convient de se décider à ce propos. A certains moments, nous réagissons au bien selon les cas comme à un mal, ou inversement au mal comme à un bien. Ainsi, nous considérons l’autosuffisance comme un grand bien : non pour satisfaire à une obsession gratuite de frugalité, mais pour que le minimum, au cas où la profusion ferait défaut, nous satisfasse. Car nous sommes intimement convaincus qu’on trouve d’autant plus d’agréments à l’abondance qu’on y est moins attaché, et que si tout ce qui est naturel est plutôt facile à se procurer, ne l’est pas tout ce qui est vain. Les nourritures savoureusement simples vous régalent aussi bien qu’un ordinaire fastueux, sitôt éradiquée toute la douleur du manque : pain et eau dispensent un plaisir extrême, dès lors qu’en manque on les porte à sa bouche. L’accoutumance à des régimes simples et sans faste est un facteur de santé, pousse l’être humain au dynamisme dans les activités nécessaires à la vie, nous rend plus aptes à apprécier, à l’occasion, les repas luxueux et, face au sort, nous immunise contre l’inquiétude. Quand nous parlons du plaisir comme d’un but essentiel, nous ne parlons pas des plaisirs du noceur irrécupérable ou de celui qui a la jouissance pour résidence permanente - comme se l’imaginent certaines personnes peu au courant et réticentes à nos propos, ou victimes d’une fausse interprétation - mais d’en arriver au stade où l’on ne souffre pas du corps et ou l’on n’est pas perturbé de l’âme. Car ni les beuveries, ni les festins continuels, ni les jeunes garçons ou les femmes dont on jouit, ni la délectation des poissons et de tout ce que peut porter une table fastueuse ne sont à la source de la vie heureuse : c’est ce qui fait la différence avec le raisonnement sobre, lucide, recherchant minutieusement les motifs sur lesquels fonder tout choix et tout rejet, et chassant les croyances à la faveur desquelles la plus grande confusion s’empare de l’âme."
b) Augustin
« Les même choses sont mal utilisées par les uns et bien par les autres. Celui qui en use mal s’y attache par son amour et s’y ligote - c’est qu’il se soumet aux choses qu’il lui revenait de soumettre et constitue pour lui en multiples biens ce dont lui-même, par l’ordre qu’il y introduirait  et le bon usage qu’il en ferait devrait être le bien. Celui qui les utilise avec rectitude montre que si elles sont bonnes, ce n’est pas par elles-mêmes, car elles ne le rendent ni bon ni meilleur mais le deviennent grâce à lui; et c’est pourquoi il n’est pas agglutiné à elles par amour…Il les dépasse de toute sa hauteur, prêt à la garder et à la régir si nécessaire, plus prêt encore de les perdre que de les avoir…Ce ne sont pas les choses elles-mêmes mais les hommes qui les utilisent mal qui doivent être accusés » I 33 Le libre arbitre. Saint Augustin.nrf 1998 œuvres I sous la direction de L Jerphagnon
« Malgré cette merveilleuse variété des nations répandues sur toute la terre, de croyances et de mœurs si différentes, divisées par leurs langues, leurs armes, leurs coutumes, il n’existe toutefois que deux sociétés humaines ou..deux cités .L’une est la cité des hommes qui veulent vivre en paix selon la chair ; l’autre celles des hommes qui veulent vivre en paix selon l’esprit et quand les désirs des de part et d’autre sont accomplis chacune à sa manière est en paix….la chair c’est l’homme ( c’est-à-dire l’ignorance de Dieu qui lui est l’esprit)… »   « Néanmoins, quiconque attribue au corps l’origine de tous les maux de l’âme est dans l’erreur..Car cette corruption du corps  qui appesantit l’âme n’est point la cause mais la peine du pêché et ce n’est point la chair  corruptible qui a rendu  l’âme pécheresse mais l’âme pécheresse qui a rendu la chair corruptible.. Car ce n’est point  en tant qu’il est dans la chair , où le diable n’est point mais en tant qu’il vit selon lui-même que l’homme devient semblable au diable; le diable aussi a voulu vivre selon lui-même quand il n’est pas demeuré dans la vérité et sa parole ne vient pas de Dieu mais de  lui-même »  Cité de Dieu  XIV 3   
c)Locke
La nature montre qu’il y a une limite à l’accumulation. Locke donne plusieurs exemples à cette limite naturelle. Ainsi « avant l’appropriation des terres, celui qui amassait autant de fruits sauvages et tuait, attrapait ou apprivoisait  autant de bêtes qu’il lui était possible mettait par sa peine, ces productions hors de l’état de nature et acquérait sur elles un droit de propriété : mais si ces choses venaient à se gâter et à se corrompre pendant qu’elles étaient en sa possession et qu’il n’en fit pas l’usage auquel elles étaient destinées si ces fruits qu’il avait cueilli se gâtaient, si ce gibier qu’il avait pris se corrompait, avant qu’il put s’en servir, il violait sans doute les lois communes de la nature et méritait d’être puni parcequ’il usurpait la portion de son prochain à laquelle il n’avait nul droit et qu’il ne pouvait posséder plus de bien qu’il n’en fallait pour la commodité de la vie… »  V 38 Mais qu’Est-ce qui a tout gâté ? C’est l’argent pour Locke. Il écrit « Au commencement tout était comme une Amérique…Et il est à remarquer que dès qu’on eut trouvé quelque chose qui tenait auprès des autres la place de l’argent d’au jourd’hui, les hommes commencèrent à étendre et agrandir leurs possessions. Mais depuis que l’or et l’argent qui naturellement sont si peu utiles à la vie de l’homme par rapport à la nourriture, au vêtement et à d’autres nécessités semblables ont reçu un certain prix et une certaine valeur, du consentement des hommes quoique après tout le travail contribue beaucoup à cet égard, il est clair, par une conséquence nécessaire que le même consentement a permis les possessions inégales et disproportionnées. Car dans les gouvernements où les lois règlent tout, lorsqu’on y a proposé et approuvé un moyen de posséder justement et sans que personne ne puisse se plaindre qu’on lui fait tort, plus de choses qu’on peut consumer pour sa subsistance propre et que ce moyen c’est l’or et l’argent lesquels peuvent demeurer éternellement entre les mains d’un homme sans que ce qu’il en a, au-delà de ce qui lui est nécessaire soit en dagner de se pourir et déchoir, le consentement mutuel et unanime rend justes les démarches d’une personne qui avec des espèces d’argent agrandit, étend, augmente ses possessions autant qu’il lui plaît… » John Locke seconde traité de gouvernement civil. Chapitre V

3) La question faits/valeurs. Peut-on objectivement juger un usage ?
a) H. Kelsen. Théorie pure du droit " une théorie pure du droit ne s’oppose en rien à l’exigence d’un droit juste mais se déclare incompétente pour décider si tel ordre juridique est ou n’est pas juste, ainsi que pour déterminer l’élément fondamental de la justice. Une théorie pure du droit , une science ne saurait répondre à une question à laquelle il est absolument impossible de répondre de manière scientifique… » p 58  "On ne peut décider rationnellement de ce qui représente la valeur suprême entre la liberté et l’égalité. Or le jugement de valeur subjectif et donc relatif, donné en réponse  à cette question équivaut habituellement   à l’assertion d’une valeur objective et absolue, d’une norme généralement  valide. …Or il est en principe exclu de justifier la fonction émotionnelle par la fonction rationnelle dans la mesure ou la question concerne des fins ultimes ne constituant pas les moyens de servir des fins ultérieures… » pp 59
b) Léo Strauss (droit naturel et histoire): ainsi pour Strauss si on admet la neutralité bienveillante pronée par les "sciences sociales" «  les principes du cannibal sont aussi défendables et aussi sains que ceux de l’homme policé. » il faut un étalon qui constitue un idéal. Celui-ci « ne peut être trouvé dans les besoins des différentes sociétés car elles ont, ainsi que leurs composants , de nombreux besoins qui s’opposent les uns aux autres… » p 15. De même pour lui " l’interdit prononcé contre les jugements de valeur en science sociale conduirait aux conséquences suivantes. Nous aurions le droit de faire une description purement factuelle des actes accomplis au su et au vu de tous dans un camp de concentration et aussi sans doute une analyse, également factuelle des motifs et mobiles qui ont mû les acteurs  en question mais il nous serait défendu de prononcer le mot de cruauté. Or chacun de nos lecteurs, à moins d’être complètement stupide, ne pourrait manquer de voir que les actes en question sont cruels… » p 59 « Weber, comme tous ceux qui ont réfléchi sur la condition humaine ne pouvait s’empêcher de parler d’avarice, de cupidité, de manque de scrupules, de vanité, de dévouement, de sens de la mesure ou d’autres choses semblables, bref de prononcer des jugements de valeur. Il s’indignait contre les gens qui ne voyaient pas de différence entre une gretchen et une prostituée, ceux qui restaient insensibles à la noblesse du cœur présente chez la première, absente chez l’autre… » p 60. De plus Weber, chantre de la "neutralité" en sciences humaines n'a pas été cohérent. Il  a aussi procédé à des jugements de valeur. Ainsi « c’est un fait que l’interprétation particulière du dogme de la prédestination qui a soi-disant donné naissance à l’esprit capitaliste est fondée sur une méconnaissance radicale du calvinisme. C’est une corruption de cette doctrine ou, pour user du langage de Calvin lui-même, c’est une interprétation charnelle d’un enseignement spirituel. Au mieux, Weber aurait pu se flatter de montrer qu’une corruption ou une dégradation de la théologie de Calvin entraîna l’apparition de l’esprit capitaliste (mais) le tabou qu’il avait mis sur les jugements de valeur l’a empêché d’introduire cette précision essentielle… » p 66

4) La question de l'impôt juste et du"moral" en économie

a) Le moral des ménages chute, les chances d'atteindre 2% de croissance s'éloignent
LE MONDE | 28.09.07 | 11h15  •  Mis à jour le 28.09.07 | 11h15   
Ce sont deux mauvais chiffres que l'Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) a publiés vendredi 28 septembre : le premier révèle un net recul du moral des ménages (- 6 points) en septembre, le second confirme le chiffre décevant de la croissance française au deuxième trimestre (+ 0,3 %). Il éloigne – voire compromet – les chances de voir le produit intérieur brut (PIB) progresser de 2 % en 2007, ce qui était l'hypothèse basse retenue par le gouvernement Villepin pour bâtir son projet de budget pour 2007.
Publiés au plein cœur de l'été, les premiers résultats de la croissance française au deuxième trimestre avaient surpris nombre d'économistes par leur faiblesse – un petit + 0,3 % –, liés notamment au ralentissement de l'industrie manufacturière, à la contribution négative du commerce extérieur et au fléchissement de l'investissement. Vendredi matin, l'Insee a confirmé ce chiffre et réévalué de 0,1 point à + 0, 6 % la progression du PIB au premier trimestre. Selon Ronan Mahieu, chef de division des comptes trimestriels, "ces révisions à la marge portent l'acquis de croissance pour 2007 de 1,3 % à 1,4 %". "Il faudrait, ajoute-t-il, une croissance soutenue au second semestre, de l'ordre de + 0,8 % à chacun des deux derniers trimestres, pour atteindre les 2 % de croissance en 2007". Compte tenu de l'environnement international, du ralentissement de la croissance aux Etats-Unis et de l'appréciation de l'euro qui va creuser le déficit commercial français (plus de 30 milliards d'euros en cumulé), on voit mal les raisons qui pourraient permettre un tel redécollage de l'économie française.Sur la foi notamment des chiffres "catastrophiques" de la balance commerciale, Jean-Christophe Caffet, économiste France chez Natixis, table sur une progression de 0,5% du PIB aux deux derniers trimestres, et sur une croissance annuelle de 1,8% cette année comme en 2008. Depuis l'été, la plupart des économistes ont revu à la baisse leurs prévisions et s'attendent à la persistance d'une croissance molle en 2008. Si leurs chiffres se révélaient justes, ils compliqueraient singulièrement la tâche du ministre du budget Eric Woerth et celle de la ministre de l'économie Christine Lagarde.
PESSIMISMELe climat, en tout cas, a bien changé depuis le printemps. En mai, dans la foulée de l'élection de Nicolas Sarkozy à la présidence, l'Insee avait constaté une amélioration spectaculaire du moral des ménages : une hausse de 6 points. Il fallait remonter aux législatives de juin 1997 pour trouver une plus forte progression (+ 9 points). En septembre, c'est l'évolution inverse qui est relevée : l'indicateur mesurant ce moral est en net recul, puisqu'il s'établit à - 21 points contre - 15 en juillet. La baisse la plus notable, souligne l'Insee, concerne l'opinion des ménages sur les perspectives d'évolution du niveau de vie en France, qui se dégrade fortement (- 15 points). Les ménages sont de nouveau plus pessimistes sur leur situation financière future et plus nombreux, ce qui est mauvais signe, à douter de l'opportunité de faire des achats importants. Tout se passe comme si l'opinion publique française n'anticipait pas d'effet bénéfique sur le pouvoir d'achat des mesures prises depuis le printemps par le gouvernement Fillon, "paquet fiscal" présidentiel en tête.
Claire Guélaud

b)Le nombre de chômeurs en France a augmenté de 0,6% en août
LEMONDE.FR avec AFP | 28.09.07 | 07h18  •  Mis à jour le 28.09.07 | 07h22
Pas de statistiques mais une hausse du chômage en France au mois d'août. C'est ainsi que l'on pourrait résumer l'information transmise jeudi par le ministère de l'emploi selon laquelle le nombre de demandeurs d'emplois inscrits fin août à l'ANPE a augmenté de 0,6 % (+11 800) soit 1 970 600 chômeurs en France, en catégorie 1.
Après des mois de polémiques, le ministère n'a donc pas communiqué d'estimation mensuelle du taux de chômage BIT, seule référence admise au plan international. Sur un an, il reste en baisse (-8,8%). La catégorie 1 de l'ANPE retient les personnes cherchant un emploi à temps plein en CDI et qui n'ont pas travaillé plus de 78 heures dans le mois écoulé.
Dorénavant, le taux sera publié tous les trois mois, a prévenu le ministère de l'économie et de l'emploi, conformément à un rapport remis à la ministre, Christine Lagarde. Le rapport avait été commandé après les élections aux inspections des finances (IGF) et des affaires sociales (IGAS) pour tenter de sortir de la crise avivée par la période électorale et l'absence de publication de l'enquête emploi 2006 de l'Insee, attendue en mars.
"Dans un souci de transparence" et suivant le rapport, Mme Lagarde a jugé "important" de continuer à rendre compte chaque mois du niveau des inscriptions à l'ANPE. "Sans que cela fasse nécessairement l'objet de grand messe ou de commentaires divers et variés", a-t-elle dit, en écho aux économistes et statisticiens qui jugent les variations mensuelles peu significatives.
Le collectif "Les autres chiffres du chômage" (ACDC) a salué l'arrêt de la publication mensuelle du taux, mais a jugé "précipitée" la décision de l'Insee "d'adopter sans débat des changements de calcul".
Les chiffres de l'ANPE "sont intéressants pourvu qu'on ne leur donne pas un sens qu'ils n'ont pas. Ils indiquent le nombre d'inscrits ANPE, pas le nombre de chômeurs", a rappelé Thomas Coutrot, l'un des statisticiens du collectif au coeur de la fronde. Les chiffres de l'ANPE sont éminemment sensibles aux changements intervenus depuis 2005 dans le service public de l'emploi, promis à une fusion prochaine avec l'Unedic (assurance chômage). Ils ont surestimé d'environ 20% la baisse du chômage ces dernières années, selon le rapport IGF/IGAS.
Pour la première fois depuis de longs mois, le nombre de demandeurs d'emploi de longue durée (inscrits depuis au moins un an) est en hausse. "Il n'y a pas lieu de s'inquiéter outre mesure", a réagi Christian Charpy, le directeur général de l'ANPE dans les Echos à paraître vendredi. "Août a été mauvais, car les conditions climatiques ont pesé sur l'activité estivale".
Si on ajoute à la catégorie 1, les chômeurs prêts à accepter un temps partiel ou un CDD, la tendance s'incrit à la baisse, de 0,3% à 2,098 millions de personnes fin août.

c )Les fruits et légumes et le poisson sont-ils trop chers ?  France Info - 25 septembre 2007 .Selon une étude du Credoc, un quart des Français n’achètent pas de fruits, de légumes ou de poisson en raison de prix trop élevés. Plus de 40% d’entre eux reconnaissent pourtant qu’il est important pour la santé d’en manger. Et vous, faites-vous vos courses en fonction des prix ?

d) Novembre 2005 LES PRINCIPES DE L’IMPÔT JUSTE ET EFFICACE Serge-Christophe KOLM*
Le gouvernement a décidé de ramener le taux marginal de l’impôt sur le revenu de 49% à 40%.L’exercice élémentaire le plus classique pour les étudiants débutants en sciences économiques consiste à calculer la perte sèche pour la société qui résulte d’un écart – un « coin » – imposé entre le prix pour le vendeur et le prix pour l’acheteur (ici, de travail). 40% : quel coin ! Cet écart est plus faible pour les revenus plus faibles. Mais il subsiste même pour le crédit d’impôt qui est plus faible si l’on travaille plus. Ces coins sont de plus augmentés des charges sociales. A ces taux, et pour ce bien général qu’est le travail, le gaspillage est gigantesque. Il se traduit aussi par du chômage. Ce gaspillage s’entend au sens des théoriciens de l’économie (Pareto) : tout le monde peut être plus heureux en faisant les choses autrement. Cela n'est pas de la politique, simplement de la réflexion. Le gâteau peut être plus grand, quelle que soit par ailleurs sa distribution.    Mais peut-on faire autrement ?    Rien n’est plus facile. Il suffit, par exemple d’exonérer les heures supplémentaires de l’impôt sur le revenu. M. François Bayou a proposé d’exonérer les heures supplémentaires des charges sociales. C’est bien vu, mais il faut aller jusqu’au bout et les exonérer aussi de l’impôt sur le revenu.     Cela, toutefois, n’empêcherait-il pas l’impôt d’avoir un rôle de redistribution du revenu ?    Absolument pas. Imaginez, à titre d’illustration, une redistribution égale complète des revenus gagnés par 35 heures par semaine (ou par 30 heures, ou par 25). Il en résulterait une redistribution énorme, dont aucun égalitariste réaliste n’a jamais osé rêvé. A titre d’indication, les redistributions actuelles redistribuent le revenu gagné pendant 1 à 2 jours par semaine, selon les pays (des Etats-Unis aux pays scandinaves).
Dépénaliser le travail Le point est que le taux optimal de 0%, qui assure l’efficacité, est le taux marginal, sur les dernières unités de chaque revenu perçu. Ce n’est pas le taux sur les autres unités (le « taux inframarginal » sur les « unités inframarginales »). En d’autres termes, ce taux est 0% par rapport au travail, pas par rapport au taux de salaire et aux capacités productives qui déterminent celui-ci. Cet impôt qui n'induit ni gaspillage ni chômage ne dépend donc pas de la quantité de travail total fournie par chacun, mais il dépend du taux de salaire. Et c’est ce taux de salaire qui détermine, en moyenne, le gros des différences de revenu (revenu gagné et revenu de l’épargne du revenu gagné). Si, d’ailleurs, quelqu’un travaille plus que quelqu’un d’autre, n’est-il pas juste qu’il perçoive la rémunération de cet effort supplémentaire ? L’exemple précédent ne parle du travail que par sa durée. On peut inclure dans ce raisonnement le travail de formation et l’intensité du travail. Quand l’intensité conduit à une prime de rendement, on peut, comme pour les heures supplémentaires, exonérer la prime de rendement de l’impôt sur le revenu. De même, il existe parfois des primes pour la formation antérieure, ou des barèmes faisant dépendre le salaire de cette formation, et des exonérations semblables sont possibles.
Ce que l’on voudra, en fin de compte, c’est asseoir l’impôt non pas sur les paramètres choisis du travail, mais sur les capacités productives données des personnes, donc sur les causes de leur revenu dont elles ne sont pas responsables. Une feuille de paye fournit beaucoup des informations nécessaires : taux de salaire, salaire et durée du travail – ce qui implique un taux de salaire –, primes, type de travail qui implique souvent une intensité ou une formation requises, mention explicite de la formation etc. Et 9/10 des revenus du travail dans les pays développés sont des salaires. Les administrations fiscales ont des routines bien établies pour estimer les assiettes de leurs impôts : demandes, recoupements, vérifications, pénalités, comparaisons, classifications, et même « forfaits ». L’un dans l’autre, l’assiette recherchée est plutôt plus facile à estimer que celle des impôts actuels, et, en tout état de cause, on ne cherche pas ses clefs, perdues dans le noir, sous le réverbère parce qu’il y fait plus clair. Dans le jargon des économistes, une assiette fiscale est plus « élastique » quand le contribuable peut plus facilement l’affecter par ses actions et plus « inélastique » dans le cas contraire. Les remarques qui précèdent reviennent à dire que l’impôt optimal doit avoir une assiette la plus inélastique possible parce que cela respecte l’efficacité de l’économie et de la société. La bonne réforme fiscale doit donc d’abord consister en une « désélasticisation » des assiettes. Cela vaut aussi pour les aides comme le « crédit d’impôt » : les personnes doivent être aidées au prorata de leur manque à gagner pour un travail forfaitaire et non pour leur travail effectif. Ainsi, personne n’est incité à travailler moins pour profiter de la compensation fiscale partielle de la perte de revenu.
L’impôt efficace est l’impôt juste Mais ne rencontrerons-nous pas alors le fameux dilemme entre l’efficacité économique et la justice sociale ? Nous avons noté que la désélasticisation est compatible avec toute redistribution que l’on voudra. Et il y a plus : cette mesure se trouve réaliser aussi des principes de justice fondamentaux. N’est-il pas juste que quelqu’un qui travaille plus gagne plus ? Tant les libéraux que la plupart des égalitaristes le pensent. N’est-il pas conforme à la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen, donc au préambule de notre constitution, que chacun puisse librement échanger avec chaque autre du travail pour un salaire sans qu’on se mêle de leur accord ? Cette déclaration dit que les dépenses publiques doivent être financées « selon les capacités à payer ». Mais pour un revenu gagné, la capacité à payer est la capacité à gagner, c’est-à-dire le taux de salaire, et non pas le travail. D’ailleurs, les personnes sont responsables de leur travail, mais pas de leurs capacités données, ni de la demande de celles-ci par la société, donc de leur taux de salaire qui découle de ces deux facteurs. La finance fonctionnelle Après la désélasticisation efficace et juste, le second principe de l’optimisation des finances publiques consiste à distinguer leurs différentes fonctions, qui relèvent de raisons différentes, et notamment la fonction distributive des autres (production des biens publics, stabilisation macroéconomique, etc.). Une certaine égalisation des ressources humaines, ou capacités productives, données se réalise par une distribution qui revient à partager également le produit d’un même travail notionnel de tous (avec leurs capacités différentes), à ce que chacun cède à chaque autre le produit du même travail, à ce que chacun reçoive le même revenu de base financé par un égal sacrifice de chacun en travail, et à ce que chacun reçoive selon son travail pour un certain travail et selon son travail et ses capacités pour le reste. Chacun travaille pour tous pour un certain travail, le même pour tous, et pour soi-même, librement, pour le reste. Une égalisation des ressources données ayant cette structure peut être plus ou moins intense, depuis son absence prônée par le libéralisme classique, jusqu’à l’égalisation des revenus gagnés durant 1 à 2 jours par semaine ou plus. Cela dépend du degré en lequel la société considérée se sent constituer une communauté. La forme indiquée de l’impôt et des aides relève aussi de l’impôt à taux constant (flat rate) dont la simplicité fait des miracles ailleurs, mais cela est ici compatible avec tout effet distributif des finances publiques que l’on voudra en choisissant le degré de distribution de la valeur des capacités productives.
La réforme des finances publiques dans cette direction peut se faire avec toute la progressivité ou rapidité désirée, en sorte que tout le monde gagne à chaque étape grâce à l’efficacité économique et sociale restaurée par la désélasticisation des assiettes. Les finances publiques ingurgitent près de la moitié du produit national et influencent le reste de façon déterminante par leurs dépenses, les impôts, et leur structure. Or les finances publiques actuelles résultent d’une accumulation de mesures ad hoc prises chacune en ne considérant qu’un ou deux de ses effets, sans vue d’ensemble. Le résultat est incohérent, contradictoire, gaspilleur, et fortement générateur de gaspillage et d’inefficacité de l’économie. L’efficacité, la justice, l’emploi, la croissance, et le statut international qui les accompagne, ne nous tomberont pas du ciel et ne résulteront que de la rationalisation de l’économie publique dont on a indiqué les principes de base : la désélasticisation optimale pour l’efficacité et la justice, la finance fonctionnelle distinguant les fonctions de l’action économique publique pour la clarté et la rationalité, et la simplicité du taux constant.


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